UX CALENDAR – 20 DÉCEMBRE – L’analyse ergonomique du travail dans un projet B2E

En intégrant une phase de discovery ou de cadrage de projet, nous sommes souvent confrontés dans des projets B2E à des environnements complexes dont il est parfois difficile de clairement percevoir quelle est la problématique à aborder ; quelles sont les données nécessaires qui vont nous permettre de cadrer nos objectifs, nos hypothèses et les clés du succès.

C’est dans cette mesure que l’Analyse Ergonomique du Travail (AET) devient intéressante. Elle nous permet, en tant que UX Designer d’aborder une vision systémique ; d’être en mesure d’étudier la globalité des situations de travail : les personnes, les tâches qu’ils doivent accomplir, la façon dont ils doivent s’y prendre, l’environnement dans lequel ils se trouvent, le matériel et les outils qu’ils utilisent, les instructions qu’ils reçoivent…

Quel est l’impact/objectif de l’analyse ergonomique du travail ?

Les impacts/objectifs :

  • Situer les risques dans une globalité et éviter leurs déplacements
  • Proposer et/ou améliorer le MVP ; produit/service minimum viable
  • Améliorer les conditions de travail des employés/utilisateurs
  • Améliorer la qualité et l’efficacité de la production
  • Protéger la santé des personnes.

Pour aller plus loin  ⇒ A quoi sert l‟analyse de l‟activité en Ergonomie ? François Hubault

Quel est le rôle d’un UX Designer dans l’AET ?

Au cœur de ce processus, nous sommes amenés à concevoir des scénarios impactant, d’un service et/ou d’un produit servant à la fois, à répondre aux besoins précis des utilisateurs, mais aussi de leur environnement.

Allant jusqu’à emprunter le rôle d’un ethnographe et des sciences cognitives, cette méthodologie place et/ou replace le designer UX/UI dans la posture d’empathie. Elle permet de mettre au centre de la réflexion et de l’action l’humain et son environnement pour concevoir différemment les services et les expériences clients de demain.

Le UX designer peut, dans ce cas, avoir recours à cette méthode dès la phase de discovery du projet. Son rôle consiste précisément à :

  • Observer et à analyser les situations de travail dans le contexte réel d’usage du produit/service.
  • Recueillir le maximum de données sur les comportements, les envies et les interactions de l’utilisateur, via la méthode de Shadowing par exemple.
  • Apporter la meilleure adéquation possible entre les particularités physiques et mentales des travailleurs/utilisateurs
  • Répondre aux objectifs de production

Comment ?

L’analyse ergonomique du travail permet de comprendre et de questionner l’activité au travail, à partir des observations ergonomiques et des enquêtes directes in situ.

Comprendre et observer les utilisateurs dans leur environnement interne permet d’aller au cœur de la connaissance du terrain et de l’empathie utilisateurs. Cela permet principalement d’identifier l’écart entre le travail prescrit (les tâches fournis aux salariés par l’entreprise), et le travail réel (les compromis opératoires, les aléas et les variations des situations auxquelles les salariés/utilisateurs sont confrontés dans leurs activités).

Pour reprendre le concept de A Winner (1994), “l’analyse des activités” ergonomiques, intègre une phase d’apprentissage collaboratif voire collectif permettant à la fois de saisir l’expérience des utilisateurs, leurs activités et les usages réels du travail. Pour ce faire, il est utile de savoir favoriser l’expression des collaborateurs (EX) sur leur activité de travail de façon spontanée :

  • Que se passe-t-il concrètement dans l’activité de travail ?
  • Pourquoi le travail est-il réalisé ainsi ?
  • Quels sont les effets du travail sur l’individu, sur les collectifs et la structure ?
  • La manière dont se réalise le travail contribue-t-elle réellement à la performance de l’entreprise et comment ?
  • Etc.

Source : https://www.anact.fr/file/9931/download?token=z6jIPi9d

Les principales étapes des tests d’applications B2E

Afin de questionner ces activités, il est utile de lister, cartographier et enfin de sélectionner les informations pertinentes. Pour ce faire, l’analyse ergonomique du travail passe par trois grandes phases de recherche utilisateur : une phase d’interview et une phase d’analyse et une phase de conception.

Phase d’interview

1. Construire un protocole de test sur mesure

Pour saisir l’écart entre travail prescrit et le travail réel, et décrire méthodiquement les informations recueillies lors de la phase d’observation, la méthode ITAMaMi, initialement créée par les CARSAT (Caisse d’assurance retraite et de la santé au travail) pour analyser les accidents du travail, permet de classer et d’analyser les différents parcours de l’employé, selon 5 rubriques :

 

Source : Nour Hebiri, Cartographie de la méthode ITAMaMi, 2022

 

Comme expliqué dans la cartographie ci-dessus, les rubriques permettent de faciliter les prises de notes. L’ UX Designer peut utiliser cette template pour noter les facteurs de risques et les contraintes associées. On peut également implémenter la grille des résultats en ajoutant des items sur les besoins et les objectifs du client (de l’entreprise).

2. Observer, interviewer, écouter et enregistrer les testeurs

  • Il est recommandé de se mettre dans des conditions optimales pour ne pas fausser le test lors des interviews.
  • Pour évaluer la charge mentale, il ne faut pas hésiter à interroger l’employé (selon son âge, qualification, formation, expérience, ancienneté, handicap, statut. ..). In- situ, l’évaluation mentale permet de repérer ce qui contribue réellement à alléger ou alourdir sa charge de travail au quotidien (arche qui se trouve souvent supérieur au travail prescrit). Cette évaluation permet à la fois aux employé.e.s d’être plus épanouis et productifs, et d’accroître les performance de l’entreprise non seulement au niveau de son attractivité mais aussi au niveau de sa capacité à innover.

Il est tout aussi important de préciser qu’en fonction de la disponibilité des utilisateurs, la phase d’observation et d’interview prend environ 2 semaines de recherche.

Tips

Lors de la phase d’observation, nous pouvons par exemple avoir recours à la méthode de Shadowing. Cette méthode va nous permettre d’observer l’expérience des employés/collaborateurs (EX) dans leur environnement réel. Cela inclut les ressentis et le vécu à chaque point de contact : comment il manipule les outils, avec qui il collabore, est-ce les outils digitaux utilisés et les interfaces sont adapter à l’utilisateur et à son activité…

Phase d’analyse

Après avoir noté, décrit et classé par catégories, les éléments qui composent la situation de travail, l’étape suivante de l’analyse consiste à analyser et interpréter ces résultats de tests pour hiérarchiser les problèmes à traiter et valider nos hypothèses.

Nous pouvons par conséquent analyser le Brand Experience (BX), c’est-à-dire les éléments de l’expérience client et de l’expérience employé en notant à l’aide de post-it :

L’expérience employé (EX) : afficher les effets positifs et/ou négatifs L’expérience client (EC): afficher les effets positifs et/ou négatifs

L’expérience client (EC) : afficher les effets positifs et/ou négatifs

Source : Nour Hebiri, Analyse du Brand Experience (EX), 2022

 

Source : Nour Hebiri, Analyse du Brand Experience autour d’un atelier de Focus Group, 2022

 

Cette template est collaborative. Vous pouvez également la montrer aux collaborateurs ou organiser un atelier de focus groupe afin qu’ils puissent y ajouter leurs remarques dans ces cellules (noter les irritants et en débattre par la suite via des parcours commentés) Cela ne peut qu’être enrichissant 😉

Phase de conception

L’ UX Designer trouve sa source dans une discontinuité fondatrice : celle qui oblige à faire à la distinction entre :

La tâche : appropriation des outils,

Le comportement : appropriation des procédures

Les activités : appropriation des gestes de travail, travail d’équipe comment ils collaborent entre eux….

Les fonctionnalités de l’interface doivent être en mesure de garantir l’adaptabilité de la solution finale aux besoins et attentes des employé.e.s et de l’entreprise. Il est également recommandé de faire des réunions pour briefer les équipes de développement. Le prototypage rapide des parcours permet d’avoir une bonne base de travail servant à tester et à valider les fonctionnalités essentielles de l’interface et son ergonomie.

Tips

L’analyse ergonomique du travail permet de faciliter les étapes de conception : l’architecture de l’information, les users flow, le contenu des champs et tous les éléments fonctionnels et techniques dans la phase de conception.

L’objectif ne l’oublions pas, c’est de faciliter et d’améliorer l’utilisation des solutions et/ou des moyens digitaux mis à la disposition des employés et des collaborateurs afin de converger vers des expériences de qualité, vécue tantôt en tant qu’utilisateur (UX, expérience utilisateur), tantôt en tant que client (CX, expérience client) et tantôt en tant que employé/collaborateur (EX).

Mot de la fin

L’analyse ergonomique du travail est très efficace pour optimiser les applications B2E, surtout, si l’on garde en tête qu’environ 67% des salariés ne sont pas motivés au travail. En réalité, ce qui est attendu c’est d’optimiser l’interaction homme machine (IHM), en remplaçant l’humain au centre de sa stratégie ci qui revient à :

  • Améliorer leur engagement et donc leur productivité
  • Faciliter et valoriser la gestion des tâches afin d’optimiser leur parcours et donc leur temps
  • Présenter une solution métier évolutive et adaptable aux outils digitaux et applications informatiques futures

 

 

Nour HEBIRI , UX Designer @UX-Republic


 


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