Tests utilisateurs : les pièges à éviter pour des résultats (plus) fiables

Vous avez consacré des mois à concevoir le produit parfait. Pourtant, face aux utilisateurs, c’est la douche froide : incompréhension, frustration, abandon. De plus, des erreurs de conception peuvent coûter une fortune en développement et en marketing. Les tests utilisateurs sont censés éviter ce désastre, en vous permettant de valider vos choix et d’identifier les points à améliorer. Mais comment s’assurer qu’ils révèlent la vérité, toute la vérité, et rien que la vérité ? Les tests utilisateurs, c’est l’assurance-vie de votre produit, un investissement indispensable pour minimiser les risques et maximiser le succès. Mais attention, des tests biaisés peuvent fausser toutes vos décisions, vous menant à des impasses coûteuses. Comment garantir des résultats fiables et maximiser votre retour sur investissement ? Cet article vous propose un guide pratique pour éviter les 7 pièges les plus fréquents lors de la mise en place de tests utilisateurs.

Test utilisateur

1. Négliger le recrutement des participants

Le choix des testeurs est la première étape pour garantir des retours pertinents. Si vos participants ne correspondent pas à votre cible, leurs retours ne seront pas représentatifs.

🔍 Comment bien recruter ?

  • Définir vos personas : Qui sont les utilisateurs que vous visez ?
  • Prioriser les profils clés : Tous les utilisateurs ne sont pas égaux en importance pour votre test.
  • Rédiger un bon screener : Un questionnaire de présélection clair et précis est essentiel pour filtrer les candidats.
  • Vérifier les profils : Avant et au début du test, posez quelques questions de contexte pour vous assurer que le participant correspond bien à votre cible.

💡 Exemple : Vous testez une app d’éducation canine. Si votre testeur n’a pas de chien et n’en veut pas, son avis sera peu utile puisqu’il sera dans l’incapacité de se projeter dans la situation.

2. Un scénario mal conçu

Il peut sembler simple d’écrire un scénario de test, pourtant l’exercice mérite souvent longue réflexion et plusieurs itérations. Le scénario doit être facile à comprendre pour l’utilisateur : les mots ne doivent pas être trop compliqués, mais aussi être évocateurs pour notre cible. Il doit inviter à la réalisation d’une ou différentes tâches, sans les expliciter de façon trop évidente. Dans la vraie vie, personne n’explore un site ou une app sans but précis.

🔍 Comment construire un bon scénario ?

  • Utilisez des mots simples et compréhensibles pour votre cible.
  • Formulez une situation réaliste et engageante plutôt qu’une tâche artificielle.
  • Ne donnez pas trop d’indications, pour ne pas influencer les comportements.

💡 Exemple :
“Testez l’application et dites-nous ce que vous en pensez.”
“Vous revenez d’une balade compliquée avec votre chien et cherchez des conseils pour l’éduquer. Vous tombez sur cette application. Que faites-vous ?”

Avec ce type de mise en contexte, l’utilisateur se projette et agit plus naturellement. Derrière, il s’agira pour vous d’identifier les tâches sous-jacentes à ce scénario : l’utilisation de la barre de recherche, l’utilisation des filtres, la lecture d’un article ou d’une vidéo, etc.

3. Un modérateur qui influence le test utilisateur

Animer un test utilisateur, c’est bien plus que poser des questions ! Le modérateur doit être attentif à :

  • Ses propos : leur compréhension, leur pertinence au bon moment, leur bienveillance, leur objectivité 
  • Son guide d’animation : le dérouler dans son intégralité, poser l’ensemble des questions, faire réaliser les différentes tâches au participant
  • Respecter le timing
  • Être exhaustif dans sa prise de note : le déclaratif, le comportemental, les réactions du testeur, etc 

Avec toutes ces choses à gérer simultanément et selon notre fatigue ou état d’esprit au moment du test, on peut vite lâcher du lest sur notre attitude, même complètement inconsciemment. Le risque est que celle-ci influence le participant et qu’il souhaite, par biais de confirmation par exemple, se conformer à ce qu’il a perçu de nous.

🔍  Le secret ? L’entraînement !
Avec la pratique, on apprend à poser les bonnes questions de relance, à reformuler de manière neutre et à gérer les imprévus.

💡 Cas particulier : Si un participant tient des propos contraires à vos valeurs, mieux vaut rester neutre ou, si nécessaire, écourter poliment le test.

4. Une prise de notes trop axée sur le déclaratif

Trop souvent, la prise de notes lors des tests utilisateurs se limite à la retranscription des propos tenus par les participants. Pourtant, les silences, les hésitations, les expressions faciales et le langage corporel sont une mine d’informations précieuses. Parfois, ils pourront même révéler le fond de ce que notre utilisateur aimerait transmettre mais qu’il verbalise plus difficilement. 

🔍 Comment bien prendre des notes ?

Développez une écoute active et une observation attentive, en prenant en compte tous les aspects de la communication. Entraînez-vous à décrypter les signaux non verbaux, à noter les variations de ton, les comportements et les expressions faciales, et à les croiser avec les propos tenus. Cette approche globale vous permettra de mieux comprendre les véritables réactions des utilisateurs et d’identifier les points bloquants ou les sources de frustration qui ne sont pas toujours exprimées verbalement.

💡 Exemple :

Un utilisateur affirme que “tout était clair”, mais il a cliqué trois fois au mauvais endroit et a semblé agacé. Son comportement dit l’inverse de ses mots : il y a un problème à explorer !

5. Tirer des conclusions trop hâtives

Après chaque test utilisateur, il est toujours très intéressant de noter son ressenti et ce que l’on en retient. Mais attention à ne pas tomber dans le piège d’en tirer des conclusions hâtives ! En effet, nous sommes forcément soumis au biais de confirmation, qui nous pousse à favoriser, rechercher, interpréter, et se souvenir des informations qui confirment ou soutiennent nos propres croyances, valeurs ou hypothèses préexistantes, et à ignorer ou minimiser l’importance des informations qui les contredisent. Ce biais lié à une perception sélective pourrait nous faire passer à côté de détails, qui n’en sont finalement pas dans notre analyse. 

🔍 Les bonnes pratiques dans l’analyse

✔️ Recueillir et comparer plusieurs témoignages avant de conclure

✔️ Organiser les retours par thèmes et tendances

✔️ Croiser déclaratif et comportement réel (ses réactions, le temps passé sur une tâche, etc.)

✔️ Prioriser les actions à mener en fonction de leur impact sur l’expérience utilisateur et de leur faisabilité

Ce n’est qu’une fois ces étapes réalisées qu’il sera intéressant de passer en revue vos notes prises à chaud après chaque test et de les confronter à votre analyse. Elles pourront vous permettre de voir votre étude sous un autre angle, de compléter votre analyse, ou peut être de simplement vous rendre compte que votre cerveau vous a joué des tours et que si vous vous étiez fié à vos intuitions initiales, vous auriez été dans l’erreur.  

💡 Exemple :

Lors des tests, vos utilisateurs réagissent très positivement au design soigné de votre application : “C’est super beau !”, “Ça donne le sourire, ce sont des couleurs qui inspirent la joie”. Ces retours enthousiastes pourraient laisser penser que l’expérience utilisateur est réussie. Mais en observant leur navigation, vous remarquez qu’ils peinent à trouver certaines fonctionnalités ou ne comprennent pas bien le contenu. Le piège ici serait de se fier uniquement à l’enthousiasme des utilisateurs sans creuser leurs difficultés peut mener à une fausse impression de succès. L’application séduit visuellement, mais son utilisabilité doit être améliorée pour offrir une expérience fluide et intuitive.

6. Négliger le livrable et la communication des résultats

L’aboutissement des tests utilisateurs ne se limite pas à la phase d’analyse. Trop souvent, les résultats restent cantonnés à l’équipe UX, sans être partagés avec les équipes de conception et de développement, ou sans donner lieu à des actions d’amélioration concrètes. Cette négligence rend les tests inutiles et prive l’entreprise d’un retour sur investissement précieux. A quoi auront servi ces tests s’ils n’ont pas fait avancer la réflexion globale sur le sujet, s’ils n’ont pas permis de prendre de décisions sur le produit testé ? 

🔍Soignez la phase de communication et de suivi 

  • Adapter le format au public (mail, slide, vidéo, workshop…)
  • Adapter le ton employé (plus formel avec des hauts niveaux hiérarchiques qu’avec votre collègue de bureau)
  • Mettre en avant les insights clés
  • Proposer des recommandations actionnables

Cette approche collaborative et proactive optimisera les chances de transformer les insights des tests utilisateurs en améliorations concrètes et de créer une culture centrée sur l’utilisateur au sein de l’entreprise. Et le petit plus : ce sera d’autant plus valorisant pour vous ! 

💡 Exemple : Un développeur n’a pas besoin d’un long rapport. Une synthèse visuelle avec des captures d’écran et des points d’amélioration concrets sera bien plus utile.

7. Tout miser sur l’IA 

L’IA propose de supers outils qui vous permettront de gagner beaucoup de temps, surtout si vous débutez dans la réalisation de tests utilisateurs. 

🔍 L’IA peut vous assister sur :

  • La rédaction d’un screener de recrutement
  • La prise de notes automatique
  •  Le tri et la catégorisation des retours

Cependant, l’IA ne permet pas à ce jour de remplacer l’expérience, l’esprit critique et d’analyse que vous avez en tant qu’humain. Il ne s’agira pas ici de rentrer dans le détail de la façon de se servir de l’IA pour la recherche et pour les tests utilisateurs, car c’est un domaine en constante évolution et amélioration : les constats posés à ce jour ne le seront peut être plus demain. Le conseil, certes général, mais qui restera valable (au moins pour les prochains mois – années à venir) est de rester toujours garde-fou : aidez-vous de l’IA comme vous vous aideriez d’un stagiaire ou d’un alternant qui vous assisterait (et même grandement!) sur une partie du travail, mais ne lui vouez pas une confiance aveugle.

💡 Exemple : Pendant un test, vous remarquez qu’un participant marque une légère pause avant de cliquer, fronce légèrement les sourcils ou hésite du bout du doigt sur l’écran. Ce petit moment de flottement peut révéler un doute ou une incompréhension. En tant que modérateur, vous pouvez alors intervenir : “Qu’est-ce qui vous a fait hésiter à ce moment-là ?”. Une intelligence artificielle pourrait analyser les mots prononcés, mais elle ne capterait pas ces micro-hésitations ni ne saurait les interpréter dans le contexte global du test. Votre regard humain reste essentiel pour aller au-delà du déclaratif et creuser ce que l’utilisateur ne verbalise pas toujours spontanément.

En évitant ces erreurs courantes, vous ne vous contentez pas d’améliorer vos tests utilisateurs. Vous investissez dans la qualité de votre produit, dans la satisfaction de vos utilisateurs, et dans le succès à long terme de votre entreprise. Des tests utilisateurs bien menés sont un véritable levier de croissance : ils vous permettent de réduire les coûts de développement en évitant les erreurs coûteuses, d’augmenter l’adoption de votre produit en répondant aux besoins réels des utilisateurs, et de renforcer la fidélité de votre clientèle en leur offrant une expérience exceptionnelle. Alors, ne voyez pas les tests utilisateurs comme une simple étape de votre processus de conception, mais comme un investissement stratégique pour un avenir où l’utilisateur est au cœur de votre réussite.

Florine AUFFRAIT, UX Designer @UX-Republic

 

 

Florine AUFFRAIT, UX Designer @UX-Republic