Alors que l’AB Testing permet de mesurer rapidement l’impact d’un choix de design, la recherche utilisateur, souvent qualitative, semble plus difficile à quantifier. Pourtant, ses bénéfices sont bien réels : réduction des coûts, amélioration de l’expérience utilisateur et fidélisation à long terme.
Dans cet article, découvrez pourquoi l’intégration d’une démarche centrée utilisateur est essentielle, comment mesurer son impact à travers des KPI adaptés et comment elle pose les bases des standards de demain.
Photo Vitaly Gariev / Unsplash
Il est difficile de calculer le ROI de la recherche utilisateur car ses effets sont rarement directs ou immédiats, surtout lorsqu’on parle de recherche qualitative avec des méthodes comme les interviews, les tests, les ateliers, etc.
Lors d’un AB Test, en revanche, on aura des KPIs précis à comparer entre une version A et une version B, il y a un impact direct du choix de design effectué.
Pour autant, l’intérêt d’une démarche qualitative peut être démontré et parfois mesuré.
Une nette réduction des coûts
Malgré l’investissement que représente la recherche utilisateur, celle-ci va d’abord permettre de réduire les coûts :
- Liés à des efforts de développement sur des fonctionnalités qui ne plaisent pas, des interactions qui ne sont pas comprises, etc., et qui seront vite changées. On développera une version déjà testée et éprouvée.
- Liés aux bloquants pour les utilisateurs qui n’auront pas été détectés avant la mise en production et qui entraîneront par exemple des abandons de panier et représentent un manque à gagner.
- Liés à la correction de tous les problèmes d’utilisabilité émergeant après la mise en production. Il est moins cher de changer une idée ou un prototype que de changer un site en ligne ou une app en production.
- Liés à l’impact de tous ces irritants et bloquants sur la réputation des interfaces et la fidélité des utilisateurs.
Si tous ces coûts ne peuvent pas être facilement estimés, on peut savoir lorsqu’on applique des recommandations sur un prototype ce que ces changements auraient représentés s’il avait fallu les faire sur un produit en ligne.
Les KPI classiques
On peut supposer qu’une meilleure expérience utilisateur entraîne une augmentation du taux de conversion mais pour le savoir il faudrait aussi pouvoir – de la même manière qu’un AB test – tester la performance d’une version développée sans recherche utilisateur et comparer.
On ne peut évidemment pas faire ça, mais on peut comparer une nouvelle version par rapport à sa précédente itération sur tout KPI qui nous paraît pertinent :
- Taux de conversion, taux de rétention, panier moyen, etc.,
- Des KPI plus précis sur des éléments de l’interface : taux d’exposition, taux de clic, etc.,
- Des KPI plus orientés UX: NPS, questionnaire d’utilisabilité type SUS, etc.
Il faut cependant bien choisir ses KPIs et un taux de clic plus important sur un élément à l’écran n’est pas nécessairement un positif, il faut penser qualitatif : est-ce que tous les utilisateurs qui ont besoin de cliquer sur l’élément pendant le parcours le font bel et bien ? Est-ce que les utilisateurs pour lesquels l’élément n’est pas pertinent le comprennent bien et évitent le clic ?
Des bénéfices indirects et de long terme
Quand on utilise des KPI, particulièrement le taux de conversion, il faut aussi garder en tête que mettre l’utilisateur au centre n’est pas toujours en alignement avec des intérêts business de court terme, c’est-à-dire convertir l’utilisateur ici et maintenant.
Par exemple, éliminer un dark pattern – un élément conçu pour manipuler l’utilisateur, type gros compte à rebours rouge clignotant sur une fiche produit – peut entraîner une baisse du taux de conversion sur le court terme, mais comme il améliore la confiance ou la qualité perçue de l’interface, on pourra par exemple observer une meilleure rétention sur le long terme.
Comme dit plus haut, le plus souvent on ne pourra pas attribuer ce KPI à l’élimination du dark pattern directement, l’expérience utilisateur est holistique.
De manière générale, une bonne expérience utilisateur est la somme de multiples décisions de design, un ensemble d’actions et d’interactions qui n’auront pas toujours évolué en même temps. Une amélioration de design donnée dans l’ensemble d’une refonte ne pourra pas être mesurée par une augmentation chiffrée précise des KPIs, car on ne peut pas extraire une petite partie d’un tout, mais elle participe à une expérience globale qui doit être qualitative pour convertir et fidéliser.
Un standard de qualité
L’UX des interfaces digitales s’est énormément améliorée ces dernières années. Certains problèmes d’utilisabilité fréquents dans le passé ont été presque éliminés aujourd’hui : des standards comme la validation automatique des champs de saisie et l’existence de messages d’erreur précis n’ont pas toujours existés, et il n’est plus possible de faire l’impasse dessus. Investir dans l’UX et la recherche utilisateur permet non seulement de ne pas se retrouver à la traîne sur les bonnes pratiques actuelles mais également d’avoir l’opportunité d’être un précurseur sur les standards de demain.
Inclure ses propres utilisateurs
Avec toutes les ressources disponibles, parfois gratuitement, en ligne, il peut aussi être tentant de ne pas faire d’UX ou de recherche utilisateur en interne. On pourrait suivre les bonnes pratiques existantes. Ce n’est pas idéal pour deux raisons principales :
- Une vraie veille, avec un benchmark et la sélection de bonnes pratiques provenant de sources de qualité et pertinentes pour notre projet est déjà un travail pour les professionnels de l’UX et de l’UI et devraient les intégrer,
- Connaître une bonne pratique ne veut pas dire qu’on saura l’implémenter pour notre projet et nos utilisateurs. La veille seule ne permet pas de hiérarchiser et d’arbitrer. Notre implémentation de la bonne pratique avec notre charte graphique, en interaction avec le reste de l’interface sera unique et il reste nécessaire de la tester.
Take Away
- Faire l’impasse d’une approche centrée utilisateur est coûteuse : temps, ressources, rétention client…,
- Les économies sur les ressources pendant la conception, des premières idées à la mise en production, sont immédiates,
- Les bénéfices sur le produit finalisé sont qualitatifs et sur le long terme par la création d’une relation de confiance avec nos utilisateurs et des promesses tenues sur la qualité,
- On peut néanmoins suivre des KPI classiques, taux de conversion, taux d’engagement, NPS… entre plusieurs versions du produit, avec nuance.
Marie Euzen, UX Researcher/Designer chez UX-Republic