Le Slow design : Penser la technologie autrement

Imaginez… Une ère de l’hyperconnexion ou d’ici 2020, 50 milliards de terminaux seront en ligne nous proposant ainsi un environnement saturé de technologies interactives nous plongeant dans un quotidien de l’intrusion technique et de le « culte de l’urgence ».
En réaction à l’accélération effrénée de production et de consommation, les adeptes de la “douceur technologique” s’organisent en clamant haut et fort que le temps à une valeur, en imaginant des objets et des processus de conception, mettant en avant les vertus de la lenteur, du calme, du durable.
Cette philosophie à contre-courant est communément appelé “le Slow design” . À l’origine de ce mouvement le Slow food, créé en opposition à la restauration rapide : il s’agissait de reprendre le temps. Par la suite, le concept s’est étendu à de nombreux sujets comme la décoration, l’art de vivre… Peu à peu les notions de design, d’ergonomie et d’esthétisme ont envahi la banalité de notre quotidien numérique, mais à trop vouloir l’esthétisme notre environnement, le terme de design se trouve corrompu. Aujourd’hui le Slow design serait la voie à suivre, comme un retour aux choses simples.
Cette philosophie fut définie pour la première fois en 2002 par l’universitaire Anglais Alastair Fuad-Luke, spécialise en environnement, désireux de créer un savant équilibre entre les besoins socio-culturels ; l’engagement personnel vis-à-vis d’un objet et enfin l’impact qu’il peut y avoir sur notre environnement. Ralentir pour percevoir la valeur du temps, mieux réfléchir, être vraiment présent avec ceux qui nous entourent, repenser l’environnement, les objets, les interfaces qui permettent aux utilisateurs de “respirer” sont l’objectif des designers du Slow design.

“The important waves of technological change are those that fundamentally alter the place of technology in our lives. What matters is not technology itself, but its relationship to us”

Le principe premier du Slow design est avant tout de fédérer toutes les pratiques issues des différents champs de la création pour définir une nouvelle approche de l’information, où l’interaction entre l’utilisateur et de sa technologie est conçue pour se produire dans la périphérie de l’utilisateur plutôt que constamment au centre de son attention.
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En 1995, le Tangible Media Group dirigé par le Professeur Hiroshi Ishii focalise ses recherches sur le terrain de l’expérimentation visant à mettre en évidence l’impact des technologies sur les comportements et capacités humaines. À travers de nombreuses expériences Hiroshi Ishii démontre que l’interaction avec l’information numérique par le biais de l’environnement physique s’avère plus prometteur pour l’évolution de la user expérience.
En témoigne des premiers projets du Tangible Media Group: ClearBoard ou encore Audiopad.

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Ils définissent les bases du langage des interfaces utilisateur tangible (TUI) en lien avec l’utilisateur à travers certains types d’expérimentation qui explorent les possibilités d’accès à des fonctions logicielles par la détection de mouvement, de sons, de reconnaissance de formes et la manipulation d’objets dotés de réactivités grâce à une capture vidéo. De ce fait il est l’un des laboratoires les plus prometteurs grâce à leurs idées et réalisations mêlant design, multimédia et technologie.
Dans un même registre d’évolution de la technologie : La Société Ambient Device qui a imaginé un objet connecté permettant de donner une information sur plusieurs niveaux de lecture illustrant ainsi parfaitement la philosophie du Slow design. L’écran est capable de proposer une information différente selon la distance à laquelle nous sommes de lui : quand nous sommes loin, il utilise la couleur et affiche de très gros caractères pour indiquer la température par exemple. Quand on s’approche, il affiche en plus petit la température extérieure , et quand on le touche, on peut lire plus en détail l’information.
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Pour que la technologie devient porteuse d’information et d’apaisement, il faut donc surfer sur une approche du design simple et efficace en matière de compréhension, avec des techniques comme le flat design, le travail sur la typographie, l’interaction du mouvement sur les objets connecter ou tactile… Autant de façon de faire ressentir l’information dans l’instant, adaptée à des besoins différents et à des rythmes différents.

L’objet s’adapte aux besoins de l’utilisateur et non l’inverse.

Si la notion de slow-design semble utopique pour certains, elle se développe pourtant de plus en plus dans notre quotidien technologique mettant en avant une véritable volonté de changement d’expérience utilisateur. On la retrouve dans le retour aux choses simples, dans l’exigence croissante de qualité et de bien-être au détriment du matériel et du superficiel. Du fait d’être une notion relativement nouvelle, les implications du slow design sont encore loin d’être définies et restent à explorer .
Carine Renaud, UX-Evangelist @CarineWhatElse –  Fondation UXLab @UX-Republic